Cécile Fatiman
Parmi toutes celles qui ont joué un rôle prépondérant dans l'histoire de notre pays, une place à part doit être faite à Cécile Fatiman, l'une des principales figures au congrès du bois Caïman où tous les fils de "Lafrik Ginen" étaient réunis pour définir une stratégie afin de sortir le pays du joug de l'esclavage.
Rien de plus sinistre que cette réunion nocturne des nègres, dans l'épaisseur d'un bois, que la foudre éclairait par intervalles. Les nègres, après avoir posté des sentinelles, par crainte de surprise, formèrent un grand cercle et s'assirent tous par terre.
L'un d'eux, cependant, prit la parole, et retraça avec véhémence la conduite injuste et inhumaine de leurs maîtres envers eux; il leur vanta beaucoup les délices de l'indépendance et de la liberté dont ils allaient enfin jouir. Ce discours arracha des larmes à tous les auditeurs et enflamma dans leurs coeurs le désir de la vengeance.
Après quelques cérémonies d'usage, une jeune femme, vêtue d'une tunique blanche, plongea le couteau sacré dans les entrailles de l'animal. Celle-ci s'appelait Cécile Fatiman, épouse de Louis Michel Pierrot qui commanda un bataillon militaire à Vertières et devint plus tard Président d'Haïti. Elle participa à la cérémonie du Bois Caïman: elle était une mambo, fille d'une négresse africaine et d'un prince corse. Cécile Fatiman était une mulatresse aux yeux verts et à longue chevelure noire et soyeuse. Elle avait été vendue, avec sa mère, à Saint Domingue. Cécile Fatiman vécut au Cap jusqu'à l'âge de 112 ans, en pleine possession de ses facultés.
Fatiman est, s'il en fut, un prénom musulman, qui curieusement émerge au coeur même de cette cérémonie.