La Migration et les Relations Bilatérales
entre Haiti et la République Dominicaine

A la recherche d'une solution finale

Edwin Paraison

Prix Anti Slavery 1994
Consul d’Haïti à Barahona

28 Février 2001
Dag Hammarskjold Auditorium
Organisation des Nations Unies (ONU)
New York

Nous aimerions, avant tout, féliciter le Batey Relief Alliance (BRA) en la personne de notre ancien camarade de classe et ami Maître Ulrick Gaillard pour la réalisation de cette conférence qui nous le souhaitons pourra être utile aux deux gouvernements de l’île qui sont obligés de chercher ensemble des solutions pratiques aux problèmes liés à l’immigration haïtienne en République Dominicaine.

Le temps imparti à cet exposé nous oblige à ne faire que l’esquisse de certains points pour enrichir les discussions. Il est aussi important de signaler que cette intervention est à titre personnel et n’engage pas le gouvernement haïtien.

Distingués invités,

La caractéristique insulaire de l’espace partage entre les deux républiques est au départ un élément révélateur de la mobilité humaine que l’île d’Hispaniola connaîtra au cours de son existence. Dans des circonstances historiques différentes les Européens, les Africains, dans un premier temps, les vagues d’immigrants afro-américains, jamaïcains, portoricains, Antillais du Commonwealth et arabes, dans un deuxième temps, les Nord-américains avec l’occupation et même des japonais et des chinois ont fait de cette île un lieu d’adoption.

Aujourd’hui, Haïti et la République Dominicaine, avec des indicateurs de développement plus favorables dans la partie orientale de l’île, exhibent les mêmes causes qui provoquent l’émigration de leurs habitants. Seulement aux Etats Unis et à Puerto Rico les migrants en provenance de l’île (Haïtiens et Dominicains) sont estimes à environ 3 millions.

Cette réalité binationale, qui fait partie d’un phénomène mondial ayant des racines d’ordre économique, politique et sociale, dépasse les capacités immédiates de réponse des deux gouvernements. Au contraire, cette situation contribue grandement au soutien de l’économie des deux pays avec des apports approximatifs annuels de près de 2 milliards de dollars.

Cependant, dans l’île même, il y a plus de 85 ans, un mouvement migratoire croissant s’effectue de l’Ouest à l’est. A l’origine, il s’agissait de travailleurs agricoles embauchés par des fermiers dominicains. Ils étaient utilises également sur les chantiers de construction des troupes d’occupation des Etats Unis en 1915-16. Ensuite, ils furent embauches formellement pour la coupe de la canne en vertu d’un accord signe par les autorités haïtiennes et dominicaines de 1952 à 1971. A partir de cette date, le Conseil d’Etat du Sucre (CEA) a pris la relève.

Parallèlement à cette migration légale s’effectuait une migration clandestine généralement appellee "anba fil". Ces derniers temps, un trafic d’illégaux est organisé à la frontière avec la complicité de part et d’autre de civils et d’agents publics.

Durant les deux dernières décennies, l’incidence de la main d’œuvre migrante haïtienne est une réalité incontournable non seulement dans le secteur agricole dans son ensemble mais surtout dans l’industrie de la construction. Que ce soit dans le développement du secteur hôtelier ou dans les grands travaux d’infrastructure gouvernementaux, les travailleurs haïtiens apportent leur contribution, jugée inestimable par plus d’un.

Cependant, les propos suivants prononces par le Ministre des Travaux Publics l’Ing. Diandino Pena du gouvernement de l’ex président Leonel Fernandez en 1999, sont une reconnaissance de cette réalité: Les ouvriers haïtiens travaillent mieux que les ouvriers dominicains et ils sont indispensables pour l’industrie de la construction. Ces Haïtiens ont la charge de la production agricole et du développement infra structurel de la République Dominicaine. Cela devrait être positivement perçu des deux cotes pour la mise en marche d’une politique de coopération bilatérale dans ce domaine, vu que la R.D. absorbe de cette façon une main d’œuvre qui a émigré à la recherche d’un mieux être.

Qui pourrait nier, qu’aux Etats Unis ou nous nous trouvons actuellement, les immigrants d’une manière générale dont les Haïtiens et les Dominicains contribuent, substantiellement, à faire de ce pays le plus puissant de la terre?

Les conditions d’embauche, de travail et de vie dans les bateys dénoncées sur le plan international à partir des années 70, font jusqu’à présent l’objet d’un suivi systématique d’agences du système des Nations Unies et de l’Organisation des Etats Américains (OEA). Cette situation a été qualifiée, en 1996, d’esclavagisme par l’ex directeur du CEA de l’Administration Fernandez, le Dr. Antonio Isa Conde.

L’attention de la communauté internationale a été particulièrement attirée par le fait que: l’Etat dominicain, était directement concerné, ce, à travers le CEA et les Forces Armées, selon les conclusions d’organismes tels que: le Bureau International du Travail (BIT), d’organisations de droits humains comme Anti Slavery International (ASI), Americas Watch, la Coalition Nationale pour les droits des Haïtiens, le Comité des Avocats pour les Droits de l’Homme, et le Comité Québécois pour la Reconnaissance des droits des travailleurs haïtiens en R.D. pour ne citer que ceux-là.

Ce qui a également maintenu l’intérêt des Eglises Episcopale et Catholique Romaine sur la situation des ouvriers migrants haïtiens et leurs familles. De même des groupes de solidarité internationale, des chercheurs, des journalistes îliens et internationaux se sont penchés sur cette question.

Cependant, de 1970 à nos jours certains pas ont été réalisés on peut citer entre autres faits les suivants:

De nos jours, la population haïtienne en R.D. n’est plus confinée exclusivement dans les bateys. Elle oscille entre 200, 000 et 300,000 personnes, dont 30 à 40,000 travaillent dans la coupe de la canne selon les données estimatives de la DGM datées de septembre 1999 avancées par l’ex. directeur Mr. Danilo Diaz au programme televisé Matinal. Environ 3,000 ont un statut légal dont 600 réfugiés politiques.

D’autres sources, toujours estimatives, utilisent le chiffre de 500,000.

Les groupes suivants pourraient être énumères parmi les Haïtiens se trouvant en R.D. ou vivant entre les deux pays à la fois:

Pour voyager en R.D., légalement le citoyen haïtien doit avoir un passeport valide, faire une demande de visa à l’un des consulats dominicains situes à Port-au-Prince, au Cap Haïtien ou à Ouanaminthe, présenter les pièces requises. Ce qui fait un coût total US$100 environ.

Dans le domaine politique, la chute de la dictature duvalieriste en 1987 et l’exercice du pouvoir par deux gouvernements démocratiques à partir de 1991 ont impose une nouvelle gestion des rapports entre les deux pays. Les nouveaux responsables haïtiens en synchronisation avec différents groupes de la société civile n’ont plus jamais renouvelle l’accord pour l’embauche des coupeurs de canne haïtiens. Les relations bilatérales à l’époque tournaient autour de cet accord dénonce comme un trafic d’êtres humains -impliquant les deux gouvernements- et le commerce à la frontière.

Les deux peuples à travers les échanges commerciaux ont tissé de par eux-mêmes des relations aussi fortes, que les villes frontalières des deux pays peuvent être considérées, non seulement comme des villes sœurs mais surtout comme des villes interdépendantes. Loin des décisions des centres de pouvoir, les humbles gens de Ouanaminthe, Dajabon, Elias Pina, Belladeres ou de Pedernales et Anses à Pitre comme de Jimani et Fonds Parisien ont des liens de bon voisinage et de solidarité qui constituent un exemple vivant pour le reste de l’île.

Seulement à Dajabon, les jours de foire, lundi et vendredi entre 5000 et 7000 Haïtiens se confondent avec la population dominicaine de cette ville pour un échange commercial mutuellement indispensable qui est aussi la preuve que la frontière, loin d’être un lieu de séparation est un espace de rencontre entre les deux peuples.

Les leaders de l’entreprenariat et du commerce des deux pays conscients de cette réalité et cherchant d’autre part l’union de volontés pour conquérir d’autres marches ont signe en 1998 un accord de coopération et d’assistance mutuelle paraphe par les présidents de la chambre de commerce et d’industrie d’Haïti et la Chambre de Commerce et de Production de Santo Domingo. Suivait en juillet de l’an 2000 l’accord signé entre les responsables de l’Association d’Industries d’Haïti et l’Association Dominicaine de Zones Franches.

D’autre part, depuis 1994, la classe d’affaires des deux sociétés, au-delà même de ses propres intérêts, étudie la possibilité d’un accord trilatéral avec les Etats Unis pour la création du Fonds International Hispaniola qui serait alimenté par la remise de la dette externe des deux pays face aux Etats Unis et dédié à des initiatives communes de développement dans l’île.

Des échanges se font à tous les niveaux entre les deux sociétés dont le tout dernier en date est la rencontre entre des journalistes haïtiens dominicains à Santo Domingo organisée par l’Association des journalistes haïtiens (AJH) et le Collège dominicain des journalistes (CDP sigles en espagnol). Cette réunion a donné naissance à la création d’un Forum Permanent des Journalistes dominico-haitien.

Pourquoi ne pas citer la meringue carnavalesque 2001 de Zaka Guinen qui traduit la prise de conscience d’importants segments de la population haïtienne sur les relations entre les deux pays. Haïtiens et Dominicains nous sommes des frères, nous sommes une famille, nous ne nous laisserons pas manipuler…non à la division, non à l’affrontement…vive la paix…lettres fredonnées sous le rythme contagieux du groupe pendant les trois jours gras.

Des raisons historiques et conjoncturelles expliquent que, bien des fois, les deux Etats et gouvernements passent par des périodes de crise liées à la situation des ressortissants haïtiens en R.D. spécialement:

Les crises les plus aigues entre les deux pays durant les années ’90 ont eu leur origine lors des rapatriements effectues en 1991 et 1996. Le mois dernier, les rapatriements réalises à Barahona ont provoque un tollé dans l’opinion publique des deux pays. L’année dernière 11 Haïtiens ont été les victimes meurtrières d’agents en uniforme.

Tout en condamnant énergiquement ces actes poses à l’encontre de nos compatriotes, il faut dire, avec la même douleur dans l’âme et sans passion, que plus de 300 Dominicains ont été aussi victimes au cours de la même période des échanges de tirs entre policiers et civils selon les chiffres du Comité Dominicain des Droits de l’Homme et de la Commission Nationale pour les Droits Humains.

Ces crises naissent non seulement au niveau des relations formelles entre les deux Etats mais encore au sein de différents acteurs dans les deux sociétés réagissant, différemment ; certains manipulant le thème de façon démagogique et d’autres ayant recours avec tous les risques de dérapages, aux sentiments anti-haïtiens et anti-dominicains.

Paradoxalement, aux Etats Unis, les migrants haïtiens et dominicains s’unissent pour des manifestations pacifiques conjointes, pour défendre les droits des rapatries en exhortant les deux gouvernements à gérer de façon pragmatique ce problème cyclique.

Dans ce contexte les relations, entre les deux pays même lorsqu’elles n’ont connu aucun affrontement depuis 145 ans, en dépit de l’existence de plus de 200 accords, traites, déclarations conjointes, ont évolue dans un cadre de méfiance qui n’a jamais aidé à les rendre plus dynamiques.

Néanmoins, sur le plan international, la formation des blocs économiques régionaux, l’intégration des deux pays à des espaces de financement et de politique multilatérale comme Lomé IV par exemple, le Cariforum, le Caricom, créeront les conditions pour un entendement obligatoire entre les deux Etats.

En mars 1996 les deux présidents de l’île, René G. Preval et Joaquim Balaguer mettaient sur pied, formellement la Commission Mixte Haitiano Dominicaine (CMHD) dont les travaux portent sur un ensemble de thèmes, problèmes et besoins qui devraient faire l’objet d’accords entre les deux Etats.

A propos du phénomène migratoire, ils ont reconnu dans leur déclaration conjointe, la nécessite de rechercher une solution appropriée au bénéfice des Etats dans le respect des principes généralement admis tant par l’Organisation des Nations Unies (ONU) que par l’Organisation des Etats Américains (OEA).

Vu la complexité et le caractère multidimensionnel du sujet, un Comite Technique Inter-institutionnel sur les Questions Migratoires et Frontalières (CTIQMF) a été crée au sein de la CMHD dont nous avons l’honneur d’être l’un des membres. Le mandat de la CTIQMF est d’arriver à un accord migratoire entre les deux pays.

Dans ce nouveau cadre de discussions denses et tendues par moment, pour la première fois, Haïtiens et Dominicains sont autour d’une même table, pour aborder des questions aussi importantes que la protection de l’environnement, les contrôles phytosanitaires; et aussi, pour assurer à partir d’ une conception globale, de meilleures conditions de vie aux habitants de l’île.

Les thèmes traités au sein de la CMHD sont:

Il était temps que les relations haitiano dominicaines prennent ce nouveau tournant. Les deux pays peuvent et doivent avancer dans d’autres domaines et nous sommes obliges de le faire en attendant de trouver une solution pratique au problème migratoire. L’exemple des relations entre le Mexique et les Etats Unis en est la preuve.

Près de 8 millions de mexicains vivent aux Etats Unis dont environ 3 millions d’illégaux. Chaque jour plus 1,000 sans papiers mexicains traversent la frontière. Des dizaines sont arrêtes. Près de 400 ont perdu la vie pendant l’année 2000 en essayant d’atteindre le territoire voisin, par deshytratation, noyades ou assassinats.

Avec la signature, en 1994, de l ‘Accord de Libre-échange Nord-américain (ALENA), le développement du commerce entre les Etats Unis et le Mexique dépasse aujourd’hui plus 200.000 milliards de dollars. Les responsables mexicains et etatsuniens continuent le dialogue à la recherche d’un accord migratoire base sur la réalité de l’offre et la demande.

Dans cette logique toute idée d’invasion est exclue. Et comme le dit le chancelier dominicain à propos de la réalité haitiano-dominicaine: Toute cette rhétorique chauviniste de dire que les Haïtiens viennent ici pour unifier l’île est une sottise. Nous autres, nous n’allons pas aux Etats Unis pour unifier les Etats Unis. Le Dominicain va aux Etats Unis par necessite économique l’Haïtien vient (en R.D.) pour la même raison. (ES 6-A 10/02/01)

Les 4 ans de travaux de la commission mixte, sérieusement affectes l’année dernière par la situation politique en Haïti et par la campagne électorale en R.D., ont quand même donne lieu à la signature des instruments suivants:

La signature au bas de ces documents officiels a été aposee lors de la visite historique du Président Leonel Fernandez à Port-au-Prince en juin de l’année 1998. Le Président René Preval et son homologue dominicain se sont par ailleurs engagés

Dans leur déclaration conjointe, ils ont aussi exprimé leur détermination à régulariser la situation migratoire entre les deux pays.

De plus les Ministres de la santé, des sports, les Ordonnateurs de Lomé se sont rencontrés à la frontière en plusieurs occasions pour donner suite à des ententes dans le cadre de leurs responsabilités respectives.

Il est important de signaler, sur le plan de la santé, qu’avec la présence des spécialistes cubains dans les zones frontalières haïtiennes, les Dominicains sont bien souvent reçus dans des centres de santé haïtiens comme le font les responsables dominicains pour des malades et femmes enceintes d’Haïti.

Ce nouvel élément est lie à l’immigration et à la vie frontalière, et pour lequel un mécanisme réel de coopération devrait être mis sur pied avec l’aide de la communauté internationale en attendant la construction des 4 hôpitaux dans la zone frontalière annoncée par les autorités dominicaines concernées. Projet qui devrait impliquer des l’origine la partie haïtienne.

En décembre 1999, les chefs de délégations du CTIQMF ont signe, au nom des deux gouvernements, une entente sur les modalités de rapatriements selon laquelle, la R.D. s’est engagee à respecter les droits des personnes susceptibles d’être rapatriées. Ce processus devrait se faire en coordination avec les missions diplomatique et consulaires haïtiennes et les autorités correspondantes aux postes frontaliers. Pour sa part, Haïti, devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire le flux migratoire vers la R.D. et doter ses ressortissants de documents d’identité et de voyage.

En février de l’an 2000, le CTIQMF signait une déclaration intergouvernementale sur les conditions d’embauche des nationaux des deux pays. Cette entente fait obligation aux ouvriers désireux de travailler dans l’un ou l’autre des pays se partageant l’île de se munir des documents de voyage exiges par leurs lois respectives ou accords intervenus entre eux.

En ce qui à trait à l’application stricte des deux documents précises relatifs au rapatriement et a l’embauche, on est loin de pouvoir faire une évaluation positive.

Toujours à la recherche de la dynamisation des relations bilatérales, une intéressante rencontre a lieu récemment entre le Ministre haïtien des Travaux publics l’Ing. Serge Raphaël et le directeur de l’Institut Dominicain des Télécommunications (INDOTEL) Mr. Orlando Jorge Mera au cours de laquelle les responsables des deux gouvernements se sont mis d’accord pour la première fois depuis les 30 dernières années pour réviser le spectre radio électrique des deux pays. Ces travaux porteront aussi sur la possibilité d’établir des réseaux de communication cellulaire pour l’île entière.

Ce processus de rapprochement est irréversible.

Heureusement qu’il compte sur la volonté politique des actuels chefs d’Etat de l’île qui, à leur propre manière décrivent leur conception des relations bilatérales. Pour le Président dominicain l’Ing. Agronome Hipolito Mejia, il s’agit d’ un mariage sans divorce. Pour le nouveau mandataire haïtien Jean Bertrand Aristide, les deux nations constituent les ailes d’un même oiseau.

Deux formulations symboliques qui indiquent non seulement le caractère indissoluble des liens d’une façon générale mais encore l’engagement personnel émanant du fond du cœur avec la rationalité politique de chacun d’eux.

Dans une interview accordée avant son installation à une journaliste du quotidien dominicain Listin Diario le président Aristide disait du Président Mejia: J’ai beaucoup de respect pour lui. En conversant avec lui, je vois les valeurs humaines qu’il incarne…Je vois tout ce que pourrait signifier son succès, puisque le succès du président Mejia est aussi celui du peuple dominicain et le peuple dominicain quand il est heureux, ce bonheur passera ici parce que l’oiseau a deux ailes.

Lors de son discours d’investiture le 7 février dernier le président haïtien a tenu à envoyer en espagnol un message clair à ce propos au gouvernement et au peuple dominicains: Que alegria seguir celebrando la boda sin divorcio entre R.D. y Haïti puesto que somos dos alas de un mismo pajaro

L’agenda de la CMHD étant déjà établi les deux mandataires ont l’opportunité historique de porter les relations bilatérales à un degré de confiance totale, pour maintenir la paix, la coopération et le développement dans l’île.

Evidemment la question migratoire devrait constituer la priorité No 1. Si les deux gouvernements de l’île ont pu maintenir des relations harmonieuses durant les cinq dernières années en dépit des problèmes de gestion de cet aspect particulier des relations, il faut et cela pour la tranquillité même de l’opinion publique des deux pays tout en démontrant un engagement moral et politique, faire des pas qui prouvent notre volonté inconditionnelle à aller de l’avant

Après tant d’années d’intenses débats des deux cotés de l’île, il n’est plus nécessaire de faire d’autres études sur la question migratoire pour nous mettre d’accord. Inspirée des recommandations du BIT datées de 1983 donc de 18 ans, la grille suivante représente les problèmes de fonds dont les débats au sein de la CTIQMF doivent inévitablement déboucher sur une solution finale:

Dans l’immédiat, pour sauvegarder les bonnes relations entre les deux Etats et sociétés, les deux gouvernements devraient renouveler leur engagement afin de:

  1. Appliquer de façon stricte et urgente les ententes sur les modalités de rapatriement et d’embauche
  2. Sanctionner toutes infractions des agents de l’immigration ou des militaires contre des personnes porteuses de documents légaux de voyage.
  3. Contrôler les opérations de rapatriements pour qu’ils soient diriges par des agents de l’immigration entraînes à cette fin et non par des militaires ou policiers.
  4. Eviter le rapatriement de gens se retrouvant dans une situation irrégulière mais vivant en R.D. ou en Haïti depuis un certain temps (ce qui n’est pas prévu clairement dans l’entente)
  5. Permettre aux personnes suspectes d’être en situation illégale arrêtées sur la voie publique a un moment ou elles n’étaient pas munies de leurs documents, de prouver leur statut migratoire, avant toute action de rapatriement (ce qui n’est pas clairement établi dans l’entente)
  6. Activer l’enquête et la procédure judiciaire sur les cas de citoyens haïtiens en R.D. et dominicains en Haïti ayant trouve la mort dans des circonstances violentes impliquant des militaires ou policiers, pour que justice soit faite.
  7. Garantir une indemnisation aux victimes des cas de brutalités policières (militaires) ou à leurs parents et ayants droit
  8. Assurer une formation adéquate aux agents policiers ou militaires en poste à la frontière pour garantir que l’usage des armes à feu se fera exclusivement lorsque leur vie se trouve en danger.
  9. Regulariser sans tarder le cas des pensionnaires haïtiens de l’Etat dominicain paradoxalement se retrouvant illégaux
  10. Lutter conjointement contre le trafic des illégaux et le proxénétisme transfrontaliers.
  11. Initier des programmes de sensibilisation sur la fraternité entre les deux peuples ; contrecarrer tout type de préjuges, discriminations voiles, sentiments antidominicains et antihaitiens.
  12. Appuyer les programmes des ONGs, Eglises et groupes communautaires destines aux dominicaines en Haïti et migrants haïtiens et leurs familles en R.D.
  13. Rechercher ensemble du financement international pour faire face avec des programmes à long terme à la problématique migratoire en commencant par un recensement de la communauté dominicaine en Haïti et des Haïtiens en R.D.
  14. Unir les efforts pour défendre les droits des migrants de l’île dans d’autres pays d’accueil.
  15. Veiller au respect des conventions et pactes internationaux dont les deux pays sont signataires, spécialement ceux qui portent sur le respect des droits humains.
  16. Presenter aux corps législatifs respectifs, pour sa ratification, la convention sur les droits des travailleurs migrants et leurs familles.

CONCLUSION

Evidemment toutes ces actions devraient confluer vers un accord migratoire. Cependant plus d’un pense que la solution immédiate et pratique serait une amnistie migratoire. L’expérience a été faite dans plusieurs pays notamment le Costa Rica. A ce propos le président de la Junte Centrale Dominicaine (JCE) Dr. Manuel Morel Cerda au cours d’une rencontre avec des médias locaux a cité cet exemple ou précisait-il se présentait une situation beaucoup plus grave que la migration haïtienne en R.D. avec plus de 750.000 nicaraguayens à Costa Rica.

Aux Etats Unis le législateur démocrate et latino Luis Guttierez vient de présenter un projet similaire en faveur de 6 millions d’illégaux parmi lesquels des milliers d’Haïtiens et de Dominicains. Une action que nos deux pays devraient supporter de façon conjointe et décisive.

En R.D. un projet de loi de migration qui contenait de sérieuses restrictions pour les Haïtiens, envoyé au congrès par l’ancien gouvernement a été retiré pour une nouvelle étude par l’actuel gouvernement, action jugée positive par la société civile (et les groupes internationaux de droits humains) qui, en novembre de l’année dernière à travers 35 organisations avait sollicité du Congrès National l’approbation d’une loi d’amnistie en faveur des Haïtiens vivant en R.D.

Dans le cas dominico-haïtien il n’y a pas, à notre humble avis, d’autres alternatives pouvant à la fois garantir:


Email: e_paraison@hotmail.com